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Discours de Jean-Michel Baylet, Président du PRG

 

 

 

 

 

 

 

Allocution de Jean-Michel BAYLET, Président du PRG, en clôture de la

CONVENTION NATIONALE SUR L’EUROPE

(Paris, 29 janvier 2005)

 

 

 

                        Chers amis européens,

                        Chers amis radicaux,

 

                        Merci à tous, merci infiniment, d’avoir apporté aujourd’hui, par la qualité de vos échanges, par la tolérance qui éclairait notre débat, par l’intensité scrupuleuse de votre réflexion, par l’obstination de votre souci du bien public et aussi par l’altitude à laquelle vous aviez placé vos interrogations, (d’avoir ainsi apporté), la plus belle des réponses à la plus importante des questions.

 

                        Au-delà de nos divergences d’analyse qui n’étaient pas réductibles en une journée de débat, au-delà des différences qui caractérisent, à l’inverse de la clameur unanime des foules, la pensée d’hommes libres assemblés, au-delà de cette diversité riche et chatoyante qui est la couleur même que la République, toujours, oppose à ceux qui voudraient la réduire à l’uniforme, à la pensée unique, à une sorte de religion sécularisée, au-delà encore (permettez-moi de le dire) du sujet de notre Convention, la question qui vous était posée était bien celle-ci, essentielle, éternelle, toujours réanimée par l’esprit, qu’est-ce donc que la politique ?

 

                        Et vous avez répondu, sans me surprendre (je vous l’avoue), de la plus belle manière : c’est le rêve insurgé contre la fatalité.

 

 

 

*

 

 

 

                        Ne croyez surtout pas, mes amis, que je chercherais, par un œcuménisme de tribune, à dissimuler la réalité bien concrète de nos désaccords. Je les reprendrai, pour montrer l’importance et l’urgence du travail qui nous attend encore, mais je note immédiatement la convergence capitale -qui réduit tout le reste à l’accessoire- : que vous disiez « oui » ou « non » dans le moment et sur telle ou telle modalité, vous avez tous dit « oui à l’Europe » car vous savez qu’on ne se réfugie pas derrière des faux-fuyants quand on est convoqué par l’Histoire.

 

                        Alors, nos désaccords ? Ils sont là, presque intacts, mais clarifiés par le débat, épurés jusqu’à leur expression la plus simple, et débarrassés du fatras de petite polémique où se cachent toujours les calculs d’intérêt. Ce qu’il nous reste à éclairer aujourd’hui par la délibération de nos fédérations est, au total, peu de chose puisque nous avons tous le même horizon et le même projet en perpétuel mouvement : faire progresser le rêve européen.

 

                        (Bref, j’en suis fier, nous ne sommes ni à l’UDF ni au parti socialiste).

 

*

 

 

                        J’ai entendu ceux qui disent que cette « constitution » n’en est pas une. Ils ont raison. Une véritable Constitution Européenne ne peut être que la volonté du peuple européen s’exprimant par ses représentants assemblés, revenant à la stricte séparation des pouvoirs, substituant, n’ayons pas peur des mots, une forme étatique nouvelle aux Etats perclus et sédimentés que l’Histoire européenne des conflits entre les nations nous a légués, et replaçant aussitôt les choix essentiels quant aux institutions nouvelles et quant aux grands projets politiques communs sous le contrôle exigeant des citoyens européens. Tel serait l’esprit d’une vraie Constitution. Pour le schéma, vous l’avez reconnu (et même nos invités l’ont immédiatement identifié) c’est celui des Etats Généraux, de la Constituante et de la Convention. C’est celui de la République (nous en sommes loin, j’en conviens), ce n’est pas le produit hirsute et compromis, contradictoire et mal corrigé, complexe et inachevé d’un comité d’experts, de hauts fonctionnaires et de politiques cooptés, réécrit avec l’encre du plus petit dénominateur commun des calculs inter-gouvernementaux, c’est une autre ambition que nous porterons tous ensemble demain.

 

                        Pour l’heure, nous n’avons pas de constitution à graver dans le marbre nous avons simplement à émettre un message : après l’élargissement qui ne parachève pas notre « maison commune » (j’emprunte la formule à Mikaïl Gorbatchev), avec dans cette maison le péril persistant dans les Balkans, avec des frères peu éloignés qui déjà frappent à la porte pour l’instant fermée à leurs espérances, avec dans le monde la montée parallèle et somme toute logique des intégrismes de l’économie libérale abandonnée à ses propres fins sans égards pour l’humain et du repli identitaire, ethnique et tribal, avec tous ces défis nous disons encore et toujours que le travail de construction d’un nouvel ensemble politique pacifié, démocratique et rayonnant, ce travail continue. Nous ne disons rien de plus. Et c’est à cela que pour ma part je dis oui.

 

                        Et à tous ceux qui constatent avec moi que le nouveau traité n’est pas une Constitution je demande d’être conséquents. S’il nous faut une Constitution européenne claire, lisible par les citoyens, réduite à l’essentiel des institutions, pourquoi donc devrait-elle comporter des engagements définitifs sur l’harmonisation sociale, sur la redistribution fiscale, sur la protection de l’environnement, sur les tarifs postaux ou le trafic ferroviaire, sur les droits de l’homme en Chine, sur l’interventionnisme économique, sur le pourcentage du produit européen brut affecté à l’aide au développement, sur l’organisation militaire continentale, (bref) sur tous les sujets qui sollicitent par ailleurs notre réflexion.

 

                        Il me semble, pour cette fois, que dans les domaines essentiels de la garantie des libertés publiques et du progrès du contrôle démocratique nous faisons vers l’avant un pas significatif et c’est cette avancée que j’approuve sans réserves.

 

                        Vous avait-il semblé que par l’Acte Unique, puis à Maastricht ou à Nice nous avions mieux progressé ? Non, vous ne l’avez pas pensé et pourtant vous avez dit oui à ce qui vous apparaissait, à tout prendre, comme des avancées pragmatiques et raisonnées et aujourd’hui, tout pesé, nous pouvons voir qu’en effet l’Europe a avancé.

 

                        A tous ceux qui voudraient encore (et je sais, depuis mon lointain passé aux Jeunesses Radicales, que les ressources de la pensée juridiques sont infinies dans ce parti) un plus de cela, un peu moins de ceci, je dis que le temps n’est pas aux arguties. Que le traité soit demain en échec devant nos opinions nationale et le monde entier y verra, accablé ou réjoui, le signe que la force impériale américaine va désormais se déployer sans autre contredit que celui des intégrismes médiévaux coalisés.

 

                        Notre Europe n’est pas parfaite. Elle avance cependant, elle avance obstinément. Elle contribue à l’équilibre du monde. Elle se construit en tâtonnements. Elle ne se donne pas toujours à voir sous son meilleur jour (je vous l’accorde) mais elle reste, sous la complexité de ses règlements touffus, sous l’opacité de ses décisions techniques, malgré son carcan monétariste, malgré l’exaltation de la concurrence comme une pseudo-valeur, malgré les ambiguïtés des uns et des autres, malgré la divergence des attentes nationales, malgré les insuffisances, aujourd’hui, de ce traité, elle reste malgré tout la rivière puissante, continentale, potentiellement souveraine où viennent se ré-alimenter les espérances de toutes les jeunesses de tous nos pays.

 

 

*

 

 

                        Cessons nos querelles juridiques, arrêtons un instant de comparer nos catalogues des « plus » et des « moins », finissons de déplorer le verre à moitié vide ou de louer le verre à moitié plein, je vous en adjure, mes amis, arrêtons-nous de « penser trop petit » et voyons, avec l’aide de l’actualité, ce qui est vraiment le plus important.

 

                        Ce qui importe aujourd’hui (-vous l’avez tous dit avant moi-), c’est la résurgence heureusement commémorative et infiniment respectueuse que nous imposent les terribles images de la libération des camps où la barbarie prétendait enfermer l’Homme alors que les démocraties, ou ce qu’il en restait, feignaient de découvrir ce que la veule satisfaction des intérêts nationaux soulagés en 1938 avait finalement permis.

 

                        Ces images nous disent que, voilà soixante et quelques petites années, notre Europe vivait sous la botte de la tyrannie et que les poches de liberté bastionnée redoutaient la prochaine convulsion du monstre politique qui se donnait libre carrière.

 

                        Elles nous disent aussi -et vous pensez tous comme moi à l’invraisemblable gare de Birkenau avec son système de triage et ses airs industriels d’activité humaine scientifiquement organisée- que l’Holocauste n’était pas, comme on le dit trop souvent, la fulmination folle d’un animal monstrueux, mais la perfection quasi-rationnelle qui couve, lorsque l’homme libre n’y veille pas constamment, dans le délire totalitaire par lequel tout projet politique énoncé tend à se réaliser absolument. C’était la faillite de l’esprit, la ténèbre la plus profonde de la pensée dans le siècle qui avait été, plus que tout autre, rationaliste, progressiste et prométhéen. Pensons-y constamment sans jamais faire confiance au propos le plus anodin de tous ceux qui jurent, au nom de la raison, de forger un Homme nouveau. Le pire est toujours à redouter –c’est le sens même de nos commémorations- lorsqu’on prétend nier l’individu libre, responsable et solidaire au nom des intérêts supérieurs d’une collectivité ou d’une communauté. Voilà ce que nous disent ces images : la tragédie est toujours vivante comme un brasier.

                        Et malgré cette horreurdont je dis très solennellement qu’elle est effectivement indépassable et, pour toujours, irréductible à aucune autre- combien de temps le Portugal, l’Espagne ou la Grèce d’un côté, la Hongrie, la Pologne ou la Tchécoslovaquie, de l’autre côté de notre mémoire commune, ont-ils dû encore patienter sous le carcan des fascismes bricolés ou des collectivismes déshumanisés que nos diplomaties nationales jugeaient somme toute fréquentables voilà peu d’années ?

 

                        Tel est bien le premier acquis du long processus de Construction européenne que nous devrons avoir à l’esprit lorsque, tentés de dire « non » à un traité imparfait, nous dirons finalement « oui » à l’Europe et à ce que le rêve européen, inexprimable voilà 60 ans, a déjà inscrit dans la réalité : vingt-cinq peuples européens vivent aujourd’hui en démocratie et ce fait est irréversible.

 

                        Certes, notre nouvelle démocratie est imparfaite. Elle est encore à consolider dans plusieurs pays, elle est toujours à  améliorer dans le nôtre et, surtout, elle ne réalise pas par elle-même les principes républicains. Je vois encore beaucoup de monarchies dans cette vaste démocratie ; je vois encore bien peu de laïcité. Voilà pour nous tous des combats à continuer. Mais je demande à tous ceux qui seraient tentés de « jeter l’Europe avec l’eau du traité » de bien considérer cet acquis essentiel : aussi loin que notre regard puisse porter aujourd’hui, l’Europe née à Rome ne connaîtra plus la dictature comme mode de gouvernement des hommes. Ce n’est pas rien et ce n’est pas encore l’essentiel.

 

                        Car l’essentiel c’est la paix. Vous me permettrez de citer ici François Mitterrand faisant, en 1994 et au nom de la présidence française ses adieux personnels au Parlement Européen. Il disait alors : « J’ai bien vérifié :dans son Histoire, la France a fait la guerre à tous les pays européens, je dis bien tous… ». Et il ajoutait presque malicieusement : « …A l’exception du Danemark… Aller savoir pourquoi le Danemark… Mais il n’est plus temps. Et ce temps de la guerre dépassée la France vous le doit, à vous citoyens européens. ».

 

                        Ainsi disait-il « le temps de la guerre dépassée » pour désigner cette situation inconcevable par nos grands-parents et que nos parents appelaient « l’après-guerre » avec dans la voix des nuances de peur et d’incrédulité qui disaient assez ce que la paix avait de précaire.

 

                        A nos amis les plus jeunes qui penseraient «Voilà encore les vieilles lunes, les histoires d’anciens combattants »  parce qu’ils vivent naturellement dans la paix comme dans leur élément, je veux dire aujourd’hui : soyez attentifs à ne pas dilapider votre bien le plus précieux, ne tournez pas le dos, par un simple mouvement d’humeur, aux souffrances du passé qui vous ont donné (à vous) un avenir apaisé. Recevez ce prodigieux héritage en le faisant fructifier.

 

                        Vous ne voyez pas de guerre ? Elle vient de ravager l’Irak qui va s’y enfoncer encore. Elle est quotidienne en Palestine, ce pays où s’affrontent les cléricalismes pour le plus grand malheur de la paix. Elle est au Soudan, en Somalie, au Tibet en Colombie, en Tchétchénie en Côte d’Ivoire, elle menace à nouveau l’Afrique des Grands Lacs, le Pakistan, la Corée, l’Iran. La guerre est là.

 

                        Elle peut surtout embraser à chaque instant n’importe quel de nos pays comme l’a démontré la question du terrorisme. C’est, en effet, le principal enseignement des attentats de Manhattan : ceux qui pronostiquaient la fin de l’Histoire et l’apaisement définitif d’une sorte de démocratie universelle mercantile dominée par la vision caricaturale que les Américains donnent de leur magnifique Déclaration d’Indépendance, ceux-là ont été détrompés : l’Histoire, en une éruption formidablement symbolique, leur a rappelé qu’elle est bien là, qu’elle est tragique et violente.

 

                        Et le monde entier, désemparé depuis une décennie par la chute des repères que la guerre froide (puis) l’opposition entre pseudo-libéralisme et pseudo-socialisme avait fournis, de se précipiter sur un nouveau schéma explicatif, sur une nouvelle explication globale et caricaturale de la complexité : après l’affrontement Est-Ouest était venu pour certains le temps du conflit Nord-Sud, après le choc des pensées économiques « le choc des civilisations », après Nixon- Brejnev, Bush-Ben-Laden.

 

                        Si vous refusez de choisir votre camp dans cette simplification, si vous rejetez aussi bien l’universalisme dévoyé par le matérialisme sans principes que l’identitarisme fourvoyé en intégrisme et terrorisme, si vous croyez en la paix comme en un objectif toujours à reconstruire, arrêtez-vous à cette évidence : seule la construction d’une Europe politique forte et culturellement rayonnante peut nous permettre d’échapper à ce manichéisme gros de tous les dangers. Là aussi, je vous demande, je vous adjure de donner ses chances à notre chance. Notre continent s’est armé de la paix, ne le désarmez pas.

 

 

 

 

*

 

 

 

 

                        J’aurais dit ici ce qui me tient le plus à cœur si une autre question, celle de l’adhésion de la Turquie à l’Union Européenne, n’avait fait irruption dans le débat où tous la manipulent désormais à des fins tactiques.

 

                        Là encore, je serai aussi clair que votre impatience l’exige : je suis favorable à cette adhésion (dès que le moment encore éloigné en sera venu). J’entends bien ceux qui s’affrontent à coups de références historiques : l’alliance de Soliman et de François 1er pour les uns, la Pologne sauvant l’Empire autrichien de l’invasion turque pour les autres. Même si elles sont opposées, ces réminiscences suffiraient à démontrer que la Turquie porte une partie importante de la mémoire européenne, qu’elle a sa place dans la « maison commune ».

 

                        Mais au-delà de cet argument, je veux revenir à mon obsession de la paix. Où est-elle aujourd’hui le plus évidemment menacée sur notre continent ? Elle peut céder demain en Bosnie devant l’ethnicisme qui couve sous la cendre de la partition. Elle peut s’effondrer au Kosovo où la fragile ligne d’équilibre est celle des haines religieuses. Elle peut abandonner le Montenegro ou la Macédoine menacés par l’irrédentisme albanais qui se nourrit, lui aussi, d’aliments ethniques et religieux.

 

                        Face à ce danger bien réel, celui qui a vu l’Orient commencé avec les mosquées détruites à Banja-Luka ou à Mostar, celui qui a vu le passé resurgir avec les monastères orthodoxes pillés à Petch ou à Detchani, celui-là doit considérer l’Histoire moderne de la Turquie. Depuis Kemal Ata Türk, la Turquie est le seul pays de cette région à pouvoir se targuer malgré les difficultés, malgré les tentations contemporaines, d’une véritable tradition de laïcité.

 

                        Devant les périls de l’heure, je crois plus important d’aider la Turquie à se rapprocher de l’Union que de paraître adhérer au chœur de ceux qui veulent l’en exclure au nom de je ne sais quelle purté culturelle que j’appellerai en réalité la tentation cléricale (alors que notre ami Jean Prigal l’appelle plus crûment « Internationale-vaticane).

 

                        Je n’attends pas de la Turquie qu’elle contribue seulement à faire vivre l’idée laïque dans une Europe dont l’absolue diversité serait ainsi reconnue et garantie, j’en escompte également qu’elle fasse rempart –certes grâce à son nouveau statut de mentor potentiel de l’Union mais aussi grâce aux ressources multiséculaires de sa diplomatie dans le monde turc qui confine à la Chine- à la propagation des idées intégristes que ne manquerait pas d’alimenter une discrimination fondée, -il faut le dire à la fin- sur le seul motif religieux.

 

                        Pour le reste, je reconnaîtrai volontiers que la Turquie est un grand pays pour partie asiatique, très peuplé, encore rural dans beaucoup de ses régions, et peu familiarisé avec une pratique démocratique exigeante. Tout cela est remédiable et nous pourrons, si nous sommes généreux, demander aux Turcs de … nous aider à les aider. A la fin, la Turquie, c’est heureux, ne ressemblera quand même pas à la France. Mais s’il nous faut construire une Europe où tous seraient riches, identiques en culture et en histoire, coutumiers du même mode de vie, locuteurs de la même langue, héritiers de la même religion, il sera plus simple de dire que nous avons abandonné le rêve européen qui consistait déjà, pour Monet et Schuman, pour Adenauer et de Gasperi, à concilier l’inconciliable, à refuser l’inéluctable, à remplacer la haine par l’espoir, à asseoir la force radieuse de la tolérance à la place de la méfiance recuite par les siècles.

 

                        Tolérance, le mot est dit, et il est grand. Quand vous aurez à vous déterminer demain pour le vote interne de notre parti et ensuite pour le choix de notre pays vous aurez à l’esprit (comme les radicaux les ont toujours) les faits indiscutables qui donnent sens à ce mot : il fut un temps , en Espagne, où l’Islam était porteur de la tolérance quand notre stricte culture européenne développait l’Inquisition ; tolérance encore hier à Sarajevo, et nous l’avons abandonnée à la guerre ; tolérance des rois Jagellons, à Vilnius et Varsovie, autrefois, pour la plus grande culture juive que la barbarie a voulu éradiquer aux mêmes endroits.

 

                        C’est bien là le seul véritable enjeu de notre débat aujourd’hui : nous voulons plus de lumière Nous étions sortis tous ensemble du Moyen-Age ; le mouvement de Renaissance était parti de Florence mais toute l’Europe l’avait entendu. Il se préparait de longue date.

 

                        Europe des marchands disent certains ? C’était déjà vrai de ce réseau marchand tissé de Milan jusqu’à Bruges, Amsterdam et Hambourg. Et simultanément se mettait en place la grande constellation des universités européennes de la Sorbonne à Cracovie, d’Oxford à Grenade et Madrid. Comme nous, les anciens Européens avaient refusé que leur avenir soit dominé seulement par une communauté d’intérêts matériels. Comme nous, ils croyaient à la prééminence de la politique et de la culture sur l’économie et la technique. Comme nous, ils portaient déjà le message européen singulier de l’espérance et de l’humanisme.

 

                        Ne soyez pas sourds à ces grands échos venus du meilleur de notre passé commun. N’allez pas renier, pour des vétilles trop triviales ou des projets trop éthérés, ce que furent les grands Européens et désespérer les jeunes Européens qui vous regardent.

 

                        Vous le savez –et je n’y insiste plus- pour moi je dirai oui à l’espérance. Je le dirai d’autant plus fortement que l’espoir n’est jamais une évidence ; il faut toujours se battre pour que demain soit plus beau.

 

                        Et vous, mes amis radicaux, vous serez fidèles à ce que vous êtes, à votre idéal politique jamais résigné, aux combats de nos grands aînés et à l’attente des plus jeunes qui prendront notre place. Vous ne mettrez pas l’Europe en panne.

 

                        Une fois de plus, la République a besoin des radicaux. Vous serez au rendez-vous et l’avenir vous en saura gré.